Le RSA : aide aux pauvres ou aux employeurs ?

Publié le par Jihad WACHILL

Le RSA sera versé aux travailleurs, jusqu’à 1,04 SMIC. Il risque de provoquer une multiplication des emplois précaires et à temps partiel.

Le revenu de solidarité active (RSA), proposé par le haut-commissaire aux solidarités actives, Martin Hirsch, sera versé à partir du 1er juillet 2009. Il revêt une triple dimension. Premièrement, il remplace les allocations RMI et API (allocation de parent isolé), à montant inchangé (aujourd’hui 448 euros). Il s’agit alors d’un simple revenu minimum garanti, qu’il n’est pas question d’augmenter. Deuxièmement, il est une prestation d’« intéressement » censée inciter les allocataires de ces mimima sociaux à reprendre un travail même mal payé. Alors que les mécanismes d’intéressement actuels sont transitoires, le RSA sera pérenne. Il permettra un cumul partiel de la prestation sociale avec le salaire. Les derniers arbitrages financiers décidés par le gouvernement ont fixé le taux de cumul à 62 %. Cela signifie qu’un érémiste reprenant un travail touchera son salaire plus son RMI amputé de 38 % du salaire. Le dispositif s’annule à 1,04 SMIC (actuellement 1 374 euros brut par mois).

Pour des raisons d’égalité, la même prestation est versée aux travailleurs qui touchent des salaires inférieurs à 1,04 SMIC, qu’ils soient ou non sortis d’un minimum social. C’est là le troisième aspect du RSA, qui s’apparente à un impôt négatif, comme la prime pour l’emploi versée actuellement à des salariés touchant entre 0,3 et 1,4 SMIC (de 396 à 1 849 euros bruts). Les deux dispositifs se recoupent donc partiellement. Si un salarié a droit aux deux, le RSA versé chaque mois est considéré comme un acompte sur la PPE calculée sur la déclaration fiscale. Au final, les futurs bénéficiaires du RSA correspondent donc aux actuels allocataires du RMI, de l’API, à une partie des salariés touchant la prime pour l’emploi, et à une nouvelle population qui touche un salaire trop faible pour avoir droit à la PPE. Celle-ci ne sera pas revalorisée en 2009, ce qui apportera quelques centaines de milliers d’euros pour financer le RSA.

Avec le RSA, le gouvernement affirme vouloir « lutter contre la pauvreté », notamment pour ceux qui travaillent, mais il pourrait bien produire l’effet inverse. En subventionnant de façon pérenne les bas salaires, le RSA va constituer pour les employeurs une incitation à multiplier les emplois précaires ou à temps partiel. Avec au maximum 1,04 SMIC de revenus, des milliers de ménages vont franchir le seuil de pauvreté (880 euros par mois), sans sortir réellement de la pauvreté. Encore faut-il qu’ils retrouvent un travail : là encore, le gouvernement fait comme s’il existait un vivier d’emplois que les chômeurs refuseraient de prendre.

Fanny DOUMAYROU dans l'Humanité du 29 août 2008

Publié dans France - Emploi

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article